Après deux ans (déjà) de stand-by j’attaque le chantier TRX motivé par la rage. Un exutoire après le vol de la Ducati qui avait pris mon coeur et qui avait conduit la TRX à la réclusion au fond d’un box.
C’était assez injuste pour Trixie, elle avait été plus que loyale avec moi en répondant toujours présente. Disponibilité qui l’a amené à afficher 125 000 km au compteur.
A ce stade une visite approfondie avait révélé des pieds de bielles marqués et d’autres outrages du temps qui nécessitait un traitement de fond.
C’est pourquoi elle a été cloitrée deux ans, les tripes ouvertes, avec pour compagne d’infortune une sœur définitivement condamnée par un gros accident mais bonne donneuse d’organes.
Avant toute chose il fallait déjà que je m’organise un bloc opératoire un tant soit peu fonctionnel. Après deux déménagements le box faisait plus office de dépotoir que d’atelier de mécanique. C’est fou la quantité de truc qu’on évite à jeter sur le moment et qu’on benne sans état d’âme ensuite.
Toujours est il qu’au bout de deux heures et de deux poubelles collectives réquisitionnées je peux enfin me retourner dans le box et envisager d’attraper une clé de 12. Encore une petite heure pour installer des étagères de stockages pour les pièces détachées et m’arranger une servante de fortune et me voila à pied d’œuvre.
La première étape, qui prendra sans doute deux ou trois jours (on verra plus tard si je suis bon en prévision) consiste a dépouiller l’épave de tout ce qui peut encore servir.
Au niveau du châssis il n’y a pas d’espoir à avoir. Après un choc frontal et un salto avant la fourche est complètement enfoncée et le cadre est vrillé d’au moins 20 degré. En clair, quand l’arrière est à la vertical, l’avant prend suffisamment d’angle pour faire la leçon à Stoner. (c’est un Yamaha, j’aurai pu dire Rossi, MAIS ON NE TOUCHE PAS A ROSSI !). Les deux jantes sont mortes. Le bras oscillant est très suspect. En revanche l’amortisseur arrière est un EMC quasi neuf, les pneus sont à peine à 20% d’usure, les freins sont bon et, cerise sur le gâteau elle est équipée de la biellette de suspension rallongée qui faisait parti du package des TRX Cup. Une pièce quasi introuvable qui permet de basculer l’assiette de la moto sur l’avant et d’améliorer sensiblement le comportement de la moto en entrée de courbe.
Autre bonne surprise, totalement improbable vu l’état de la moto, le réservoir est comme neuf, pas une égratignure. Les carbus sont propres. Les factures fournies par l’ancien propriétaire annonces qu’ils avaient fait l’objet d’une révision complète avec changement des puits d’aiguilles et des membranes. Un très bon point car les miens étaient victimes d’une ovalisation des puits d’aiguilles qui vouait à l’échec toute tentative de réglage fin de la carburation. Une maladie endémique sur les TRX accusant un gros kilométrage.
Et puis surtout il y a le moteur. Le bon gros twin 5 soupapes par cylindre de la TRX (et accessoirement de la TDM) est d’une endurance et d’une fiabilité exemplaire à condition d’en respecter le mode d’emploi. Sa lubrification a carter sec, héritage des gènes de 750 Super Ténéré, impose une procédure particulière pour le contrôle du niveau d’huile. Procédure souvent bâclée avec pour conséquence un trop plein d’huile qui engendre des surpressions funestes pour les joints de queues de soupapes et une augmentation chronique de la consommation d’huile. Hors ici je dispose d’un moteur en pleine fraicheur et qui ne consommait pas plus de 100 ml/1000km malgré c’est 50 000 km. Bref, un moteur amoureusement entretenu et qui avait eu droit, comme il se doit, au changement de la chaine de distribution lors de la révision du jeu aux soupapes à 42 000 km. En clair, une balle neuve !
J’espère, Oh lecteur, que tu me pardonnera cette longue introduction au sujet. Après tout, il importe aussi de savoir de quoi il est question ici. Mais il maintenant temps d’attaquer le chantier.
D’abord virer les carénages éclatés et les supports tordus. Rien a garder de ce coté. Les demi guidons sont tordus mais les comodos sont intacts. je vais pouvoir récupérer un faisceau électrique complet de bout en bout ! Les leviers de freins et d’embrayage sont en bon état. Idem pour le maitre cylindre de freins avant. Avec les étriers et les durites type aviation j’ai déjà des bonnes pièces en magasin. Le radiateur n’est pas percé, d’ailleurs je m’asperge copieusement de liquide de refroidissement en le démontant. Le liquide est encore d’un beau bleu vif, c’est bon signe. Avec son ventilateur il forme un greffon pratique, allez hop sur l’étagère.
Bientôt il est rejoint par le réservoir, immédiatement emballé. Il a l’air trop neuf pour être vrai et ça me donne la banane. Une fois le réservoir déposé on accède à la boite à air. Elle est équipé d’un K&N encore tout propre. Décidément, avant de cartonner cette moto était bien soigné. Puis viennent les carbus. La c’est plus tortueux. Il faut pas se mélanger les pinceaux dans un fourbi de durites. Entre le carburant et le liquide de refroidissement qui assure le réchauffage des cuves de carbu il y a 5 durites qui arrivent ou partent d’ici. Et puis il y a aussi le cable de starter (facile) et les commandes de gaz dont le cheminement a du être décidé un lendemain de cuite juste pour faire partager la céphalite.
Au bout de trois heures j’ai enfin devant moi un moteur accessible. Pendant que je contemple le tableau je lui envoi un message télépathique « La prochaine fois, tu tombes ».
Il est l’heure de fermer l’atelier. Sur les étagères j’ai déjà une belle provision de pièces réutilisables. Une bonne journée en somme.